Histoire du Château

Le Château de Villers-Bocage
au Moyen Âge

A environ un kilomètre au sud du bourg actuel tout près de l’actuelle A84, les seigneurs de Villers possédaient un château constitué d’une motte et d’une basse-cour dont plusieurs bâtiments résidentiels. Pendant la guerre de Cent Ans, au 14e siècle, Jeanne de Villers, héritière du fief de Villers se marie avec Roger Bacon, seigneur du Molay Littry. Ils ont une fille elle aussi appelée Jeanne qui devient l’unique héritière du fief de la famille, très convoitée, elle se marie deux fois mais meurt sans enfants. De son vivant elle fit de nombreuses donations à des établissements religieux et elle fonda, l’hôtel dieu de Villers-Bocage en 1366, autrement appelé prieuré hospitalier de Sainte-Élisabeth, destiné à accueillir les pauvres, les malades et les femmes enceintes.

1637

Le Château de Villers-Bocage fut bâti en 1637 quand la famille Morin réunie les terres des paroisses de Saint-Martin et de Saint-Germain de Villers.

Au XVIIIe siècle, le château passe dans les mains de la famille Le Vicomte. Pierre François Le VICONTE de BLANGY, Baron de Blangy, seigneur et patron de Villers-Bocage, de Maisoncelles-Pelvey, de Banville, de Berville, du Teillement et de Fontaine-Etoupefour. Propriétaire aussi de l’hotel particulier de Blangy à Caen. À sa mort, son successeur fut Pierre Constantin Le Vicomte, Seigneur de Blangy le Château et de Villers ; Maréchal du camp et des armées du roi, commandant en moyenne Normandie. Né à Caen le 26 avril 1722. Il fait ajoutée au château une aile en 1766 et le projet d’une seconde aile symétrique ne vit jamais le jour en raison du contexte de la Révolution Française. Il sauve sa vie en émigrant en Angleterre et vend le château à Pierre Jacques Meslé de Grandclos en 1792.

1777

Le 2 juin 1777 Joseph II, Archiduc d’Autriche et futur Empereur du Saint Empire Romain, frère de Marie-Antoinette, fit halte à Villers-Bocage à l’occasion de sa visite en France.

Il voyageait « incognito » sous le pseudonyme de compte de Falkenstein. C’est grâce à l’affection inattendue des caennaises qu’il choisi le château de Villers-Bocage pour passer la nuit au calme. Nous vous laissons découvrir avec les mots d’une chronique d’époque le déroulement des faits :

« Le 2 Juin 1777, Joseph II Empereur, de passage à Caen, environ sur les six heures et demie du soir. Il passa devant les casernes, ensuite dans la rue Saint-Jean et Notre-Dame et prit le chemin de Villers où il coucha. Quoiqu’il fut attendu, il ne fut reconnu qu’au carrefour Saint-Pierre où le peuple cria « Vive l’Empereur ». Du Coudray croit que les préparatifs faits pour l’accueillir auraient découragé Joseph II : « En entrant à Caen, ce prince s’est aperçu qu’on avait fait de grands préparatifs pour le recevoir : le zèle incommode des habitants de cette ville l’a fait passer outre. »

BEAUREPAIRE (M.E.), Journal des choses mémorables arrivée à Caen : publié d’après des notes manuscrites du XVIIe et du XVIIIe siècle. 1890.

Il s’agit d’une esquisse pour un portrait inachevé de l’empereur Joseph II (1741-1790). Il fut empereur romain germanique de 1765 à 1790 et souverain des terres des Habsbourg de 1780 à 1790. Le fils aîné de l’impératrice Marie-Thérèse et de son mari, François Ier, Joseph II fut le premier empereur de la maison des Habsbourg-Lothringen. Il est décoré du cordon rouge et blanc d’un chevalier grand-croix de l’ordre de Maria Teresa (le plus haut ordre militaire de l’Empire). Il se tient dans un splendide intérieur, une vue à travers une fenêtre ouverte, un trône doré à gauche et une sculpture du Ares Ludovisi (Dieu Mars) derrière lui, conservé au Musée National Romain- Palais Altemps, indiquant que la peinture a été réalisée à Rome.

Au château vous pouvez admirer la chambre ou il à dormi et une copie de ce portait.

Joseph II datant de 1775, peint par Anton Von Maron (1731-1808)

1792

Pierre Jacques Meslé de Grandclos,
  Musée d’Art et d’Histoire d’Avranches

Pierre Jacques Meslé de Grandclos

Il a acheté le château de Villers-Bocage au comte de Blancy le 9 février 1792 ainsi que les dépendances, 12 fermes, 90 hectares de bois et 320 hectares de prairies pour 1 million de livres et 47 000 livres pour le mobilier.

Né le 4 mars 1728 à Saint-Malo, fils et petit-fils d’armateurs. Pierre Jacques devient enseigne de vaisseau à 13 ans, puis capitaine de vaisseau à 24 ans. Il a notamment travaillé pour René Auguste de Chateaubriand, le père de l’écrivain. Il s’appelle Pierre Jacques Meslé, seigneur de Grandclos mais se fait appeler Meslé de Grandclos. Il se marie le 20 février 1753 avec Pauline Le Bonhomme, fille de Jean Baptiste Le Bonhomme, grand armateur. Il devient armateur à 28 ans. Le 2 février 1783, Louis XVI signe l’arrêt de nomination de Meslé de Grandclos comme armateur d’une expédition de 4 navires en Chine. Il a été fait noble en 1768 avec un titre d’Ecuyer du Roi. La loi du 27 mars 1793, met hors la loi les aristocrates et les ennemis de la Révolution. Il obtient le 2 avril, un certificat de civisme. La loi du 21 mars 1793 institue, dans chaque commune, un comité de surveillance. Celui-ci a le pouvoir de dresser la liste des gens suspects et de délivrer contre eux des mandats d’arrestation. Par ailleurs, le comité délivre des documents appelés « certificats de civisme » aux personnes favorables au nouveau régime. Outre le fait de ne pas être inquiété par les autorités, ce document permet de circuler librement et notamment de rentrer dans Paris.

Son fils Stanislas est recherché mais il réussit à fuir à Hambourg puis à Londres.

Pierre Jacques devient commissaire à l’armement de la cité. Plusieurs canons sont prélevés sur des vaisseaux et sont installés autour de la ville pour la protéger des Vendéens. Ils attaqueront finalement Granville.

Le 9 décembre 1793, sur ordre du Comité de Sureté Général, il est arrêté et enfermé chez lui sous la surveillance de 2 gardes. Il parvient à s’échapper, ou alors les geôliers l’ont laissé partir. Il part ensuite à St Domingue, pendant son absence il perd de l’argent et des biens. Les commissaires profitent de son absence pour faire une halte à son château de Villers-Bocage, pour finir leur « collecte » d’argent et bijoux. En 1795, il profite de l’apaisement pour revenir en France et se fait rayer de la liste des émigrés. Il parvient à retrouver son patrimoine immobilier, notamment le domaine de Villers-Bocage. Il meurt à Villers-Bocage le 30 janvier 1806.

Stanislas de Grandclos Meslé
Musée d’Art et d’Histoire d’Avranches

Stanislas de Grandclos Meslé, le fils

Il est né à St Malo le 15 juin 1769.

Il devient maire de Villers-Bocage en 1810 et le restera jusqu’en 1830.

Par lettres patentes du 11 décembre 1815, il obtient le titre de baron héréditaire. Supprimés en 1790, les titres ont été réintroduits progressivement par Napoléon Ier. Les armoiries ont été rétablies à partir de 1808, en faveur des bénéficiaires de titres. L’anoblissement et la confirmation de noblesse n’ont été réintroduits qu’à partir de 1814, sous la Restauration.

Il meurt au château le 27 octobre 1844.

Stanislas de Grandclos, le petit fils
Musée d’Art et d’Histoire d’Avranches

Stanislas de Grandclos, le petit fils

Fils du précédent, il est né le 27 mars 1836 à Villers. Il est trésorier payeur général dans plusieurs départements français. Le trésorier-payeur général du département, comprenant le chef-lieu de région recevait le titre de trésorier-payeur général de région. Il agissait sur le terrain à la fois comme trésorier, comptable, contrôleur, conseiller économique et financier et « manager ». Il était en quelque sorte le « banquier local » de l’État et des collectivités locales.

La fonction de trésorier-payeur général était l’une des plus rémunératrices de la haute fonction publique

Il décède le 29 février 1888 à Saint Lo. Les trois générations sont enterrées dans le cimetière de Villers-Bocage mais la tombe de Pierre Jacques est pulvérisée par une bombe en juin 1944.

Sa mort entraine la vente du château en raison de lourdes hypothèques qu’il avait contracté pour ses dépenses personnelles.

1888

Suite au décès de M. le Baron de Grandclos, le château est mis en vente. Ce document attestant la vente du château nous offre une vue privilégiée du domaine et ses riches et très importants jardins. L’étude de M. Caquenée, notaire à Villers-Bocage, atteste que le château fut bâti par MANSART et que le parc à la française fut dessiné par LE NÖTRE.

Télécharger l’acte de vente

Deuxième Guerre mondiale

Amédée et Albertine de Clermont-Tonnerre achètent le château en 1930. Il est né le 10 février 1898 à à Paris 7ème, boulevard La tour-Maubourg n°60. En 1914, il s’engage comme volontaire et devient officier d’ordonnance du Maréchal Foch. Titulaire de la Croix de Guerre 14-18. Il épouse le 28 juin 1922, Albertine, comtesse de Mérode et du Saint Empire.

Le 30 juin 1944, en fin d’après-midi, 250 bombardiers britanniques lâchent 1100 tonnes de bombe. Selon le capitaine Boyers, premier pilote à bombarder la commune, la résistance aurait demandé un bombardement pour réduire une division blindée abritée dans la ville. Elle aurait assuré que les habitants étaient à l’abri au château. Le but était de rendre impraticable les carrefours et éviter l’arrivée de renforts à l’ouest de Caen. À partir de ce moment, le château devient un véritable hôpital.

Mme de Clermont-Tonnerre, aidée du Docteur Dary et de son épouse (infirmière), Mlle Marie (préparatrice en pharmacie), des sœurs de l’Hospice et du dispensaire et des secouristes de la Croix Rouge, accueillaient les blessés.

Le 7 juillet, les allemands ordonnent l’évacuation de la zone allant de Dampierre à Mondrainville. Les réfugiés doivent atteindre le sud de la ligne Saint Sever – Vire – Falaise. Les ordres sont stricts, l’évacuation doit être terminée le 9 juillet à minuit, sous peine d’être fusillé. Mme de Clermont-Tonnerre se trouve devant une difficulté matérielle d’exécuter cet ordre, 200 personnes habitent le château. Elle décide alors d’aller demander au général allemand qui commande la région de l’autoriser à laisser ouvert l’espace sanitaire que constitue le château. Le 9 elle reçoit l’avis que sa demande est acceptée mais elle doit tout de même évacuer les vieillards, les petits enfants et les blessés légers, soit une centaine de personnes. Ainsi, la zone de paix protégée par les croix rouges du toit peut encore remplir son rôle. Le 25 juillet, les allemands sentant les alliés arriver, veulent récupérer des salles du sous-sol pour y installer un poste de secours. On évacue alors les salles, des vieillards et des personnes valides quittent le lieu. 148 restent au château dont 1/3 de malades.

Les allemands partent le 4 aout vers 1h du matin, les alliés arrivent dans l’après-midi.

La guerre finie, il devint une maternité et vit naitre 450 enfants.

Le 20 juillet 1944, des éclats d’obus criblent la façade sud du château de Villers-Bocage et tuent trois personnes. Les impacts sont encore visibles.

1950

En 1950, le Nonce Apostolique et futur Pape Jean XXIII, canonisé en 2014, à séjourné une semaine au Château pour visiter la zone en Reconstruction et en bénir les nouvelles églises. Il est invité par le marquis de Clermont Tonnerre à manger et dormir au château. Aujourd’hui la suite du château où il a séjourné porte son nom (photo).

Crédits photos : ©Henri Marie, Villers-Bocage Normandy 1944, Heimdal 2003. ©Daniel Taylor, Villers-Bocage Through the lens of the german war photographer, After the Battle 1999.
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Recherches historiques : ©Valentina Loiodice, Château de Villers-Bocage ©Matthieu Balusson, Office du Tourisme